Nous sommes le premier vendredi de mars. Wanagramme accueille un texte joliment illustré d’Angèle Casanova.
En échange, Angèle publie sur son propre blog : Gadins et Bouts de Ficelles, un texte de Wana : Au jour de la Sainte Colette et je l’en remercie chaleureusement.
C’est un échange… puisqu’à l’initiative de Tiers Livre et Scriptopolis, les vases deviennent communicants : le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre… Un échange pour produire des liens autrement…“Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre.”
C’est, justement, Angèle Casanova qui tient à jour, mois après mois, la liste des participants, sur un blog dédié à ce seul usage : Le rendez-vous des vases communicants.
Qu’elle soit vivement remerciée aussi pour ça ! _____________________________________________
Au jour de Sainte-Colette
commence à chanter l’alouette
le vent dans tes cheveux
comme un vol d’alouettes
je t’attends
et j’espère leur chant
car leur retour marquera peut-être
le tien
et puis te voilà
tu m’effleures doucement
nos peaux qui se frôlent
dessinent un chant choral
doux
enfantin
En ce premier vendredi de février 2015, Wanagramme accueille un texte d’Alice Scaliger.
En échange, Alice publie sur son propre blog : Carnet d’Alice, un texte de Wana : Quand et comment être Charlie et je l’en remercie chaleureusement.
C’est un échange… puisqu’à l’initiative de Tiers Livre et Scriptopolis, les vases deviennent communicants : le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre… Un échange pour produire des liens autrement…“Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre.”
La liste des participants se trouve sur un blog dédié à ce seul usage, désormais tenu à jour par Angèle Casanova.
Qu’elle en soit remerciée pareillement ! _____________________________________________
Quand un char lit, il se passe quelque chose.
Car si les chars lisaient, ils marcheraient moins sur les villes, et les gens.
Quand un homme pleure, il se passe quelque chose.
Car si les hommes pleuraient plus souvent, nous serions plus heureux, tout simplement.
Quand une foule marche, il se passe quelque chose.
Car si les foules marchaient lentement, elles prendraient le temps de réfléchir.
Mais que reste-t-il de nos lectures ; de nos larmes ; de nos marches ensemble ?
Je voudrais raconter l’histoire d’une idée qui ne s’envole pas, d’une larme qui omet de s’évaporer ; d’une image que le temps oublie d’effacer.
C’est une utopie de joie et de couleurs ; c’est un rêve qui ne passe pas. Il résiste à l’affront du réel.
Il n’y a pas d’image à faire figurer, ni au-dessus ni au-dessous de la colère.
J’écoute en boucle cette chanson de Damien Saez.
Pas d’image, mais des mots qui fuient et disent :
Nous ne voulons pas fuir car nous sommes les clous.
Nous opposons notre résistance, car c’est nous qui fixons les solives, les charpentes dans votre société.
Nous fixons les solives de vos salives.
Aucune salve n’y pourra rien changer.
Pas d’image, car un carton brandi, un dessin, c’est l’éclair du rire ou le saisissement, c’est l’instant à quoi s’oppose la rivière des mots, son déroulé moins synthétique.
Pas d’image, mais des mots qui fuient et disent :
Nous ne voulons pas fuir car nous sommes les clous.
C’est nous qui marchons sous vos chaussures.
C’est nous qui vous donnons l’allure martiale et la grandeur, mais c’est nous aussi qui savons relier, les gens les uns aux autres, aux une aux autres les idées.
Si nous voulons encore dire quelque chose.
Nous le voulons.
Et j’écoute les mots et leur indépendance, j’écoute les grands oiseaux qui volent en tous sens, et qui se déploient, j’écoute à en perdre leur sens, j’écoute.
Ils veulent dire quelque chose.
Alice Scaliger
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Les lectures à haute voix, par Angèle Casanova
Ça siffle grince encore doucement ça piétine
Journaux indifférence au loin aube visages
Encre sale matin parfum d’après nuit blanche
Ne pas les regarder ni les entendre iPhone
Lui qui pousse encore va oh salopards mes frères
Mes semblables et tout ce qui parle dans leur silence
Attitudes vêtements traits quelques journaux les mêmes
Pas penser lire l’opinion d’autrui c’est mieux
Elle ferme les paupières quand nos regards se croisent
Lui par contre me fixe ou bien c’est moi qui rêve
Nous sommes les condamnés à voyager ensemble
J’en vois une ongles vernis avec paillettes et
Gloss et la pince à épiler puis maintenant la lime
Limande et personne pour sourire sur la ligne L
Grince encore balance et ralentit repart
L’autre zigue refait les dialogues d’une réunion
Une autre tête incline cheveux décolorés roman
(« tu crois mon amour » – silence – « je te dirai ce
Soir » – re-silence – « mais tu me l’as dit » -« oui je veux
Dire que » – « oui la crèche à 17 heures » une minute
De calme Votre pause méridienne dit le panonceau
Pas les voir les toucher les sentir
Souhaiter tranquillement pour eux une mort bien cruelle
Par exemple si le train déraillait maintenant
Comme Dumont d’Urville entre Versailles et Issy
Puis la rame ralentit on sent comme
Un raidissement un frisson ils se préparent
En face la mâchoire rédentée qui tombait se relève
L’inévitable « vous descendez ? » d’un ton trop vif
Attentifs ensemble lui saute et piétine
Retour sur l’escalier passer à travers parfum
Amour de Kenzo ou Dolce Vita escalator
Je vois ses doigts Yves Rocher sur le visage
Tiens ils ont mis l’armée en faction
(Un grand en avant, puis l’antillais mince et la fille ensuite
Queue de cheval chatain clair sous le béret Charlie
Maintenant la voix de ce quêteur aveugle me revient
Un braiement l’impression d’un grincement métallique dans un évier
Brassens ou Brel ou Trenet Sardou martyrisés
Mais Talon Aiguilles ne tiendra pas la porte
Un qui sautera le portillon Brioche Dorée
Et soudain l’enseigne du Relay je tourne
Je les quitte je vais respirer je sors de terre
Au loin l’Esplanade descend doucement vers la Seine
Wanagramme accueille, en ce tout premier vendredi de l’année 2015, un texte de Christopher Selac : Tu seras…
En échange, Christopher publie sur son propre blog : De l’autre côté du livre, un texte de Wana : Quand je rêvais d’être un poète et j’en suis honoré.
C’est un échange… puisqu’à l’initiative de Tiers Livre et Scriptopolis, les vases deviennent communicants : le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre… Un échange pour produire des liens autrement…“Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre.”
La liste des participants, que Brigetoun(qui signe aussi Paumée) a patiemment fait vivre pendant plusieurs années, se trouve sur un blog dédié à ce seul usage, désormais tenu à jour par Angèle Casanova.
Qu’elles en soient remerciées pareillement ! _____________________________________________
Tu seras…
Si tu peux prendre plaisir à anéantir
Ce qu’un autre tant d’années mit à construire
Ou arracher sous ses yeux le fruit de son labeur
Sans un remords et sans un scrupule ;
Si tu peux n’aimer l’autre que pour recevoir
Pour ta fierté, ton estime de toi et du pouvoir
Et pour ceux qui ne t’adorent pas
N’arborer qu’haines et mépris ;
Si tu peux briser honneurs et réputations
Pour seulement divertir ta cour
Et jeter en pâture à la rumeur avec délectation
D’humbles et honnêtes rivaux ;
Si tu peux ne chercher que faveurs des puissants
Si tu peux les flatter autant qu’ils te dédaignent
Si tu peux te complaire à être Muse du Diable
Pour espérer un jour un trône où t’asseoir
Si tu ne sais plus reconnaître l’intelligence
Pour toujours vénérer idiots et médiocres ;
Imaginer, ou seulement tes avenirs glorieux
N’aimer que ton reflet et celles qui y ressemblent
Si tu peux écraser sans la moindre pitié
Si tu peux être lâche et souiller l’innocence
Si tu sais être vile, si tu sais être folle
Et te vanter de tout ;
Si tu te satisfais de toute victoire facile
Ne t’allier qu’aux plus forts selon ton intérêt
Si par le mot valeur tu n’entends que richesse
Quand de la chute l’heure viendra,
Alors, Reine d’un jour, Déesse de pacotille
Revenue à ta condition misérable
Ouverts tes yeux bouffis de sanglots
Tu ne seras pas même un homme, ma fille
Christopher Selac
crédit : Culotte abandonnée – 2010,
avec l’aimable autorisation de Johnny Collangette _____________________________________________
On peut écouter ce texte lu par Olivier Savignat :